SOIXANTE SIXIEME JOUR : LE 14 DECEMBRE 2019




      Aujourd'hui nous quittons définitivement la région du lac Inlé en pirogue à moteur pour une navigation de six heures vers Phekon où nous prendrons le bus  pendant 2 heures et demi pour terminer l'étape prévue à Loikaw . Une dure journée en perspective, surtout en partant à 8h00 ,car nous risquons d'avoir très froid avec le vent vitesse et je ne parle pas du bruit assourdissant du moteur qui va nous accompagner pendant tout ce temps ! C'est à regret que nous laissons derrière nous le magnifique lac Inlé et ses cités lacustres peuplées de jolies maisons sur pilotis , ses curieux pêcheurs à la nasse et au trident , ou au filet , ses jardins flottants et aussi ses habitants , les Inthas , fort souriants .Nous avons eu la chance en trois jours de pouvoir approchés de prés les autochtones et de découvrir leur vie , entièrement  régie par le lac :  tout est lacustre ici ,leurs déplacements en  petites pirogue personnelles, leurs maisons équipées d'un "garage au sous sol"et d'un débarcadère privé , leurs jardins flottants , leurs écoles , leur poste et bien sur leur alimentation .Ici on mange beaucoup de tilapias , de carpes et de poissons chats et tous les légumes tels que les christophines , les courges , les tomates , les haricots qui poussent sur les clayettes en bambous dans les jardins flottants . On peut dire aussi que la qualité de l'hôtel Inlé Resort y est pour quelque chose dans la réussite de notre séjour grâce au confort de ses chambres , au cadre de vie , à la beauté de son parc et à son sympathique manager .Bien que nous ayons eu froid le matin et le soir , nous avons pu  apprécié la limpidité du ciel bleu immaculé tout au long de notre séjour . Et la cerise sur le gâteau ,  la journée qui se termine en apothéose avec un incomparable coucher de soleil sur le lac et le cirque de montagnes qui l'entoure . Un très joli souvenir !



            Nous retrouvons comme convenu Zaw à la réception  vers 8h00, chargés de nos bagages .Pour finir ceux-ci ne partent pas avec nous sur la pirogue, mais en bus jusque Phekon , avec lequel nous  finirons l'étape . Il est temps d'enfiler un coupe vent  et personnellement j'ai même prévu une paire de chaussettes pour ne pas avoir froid aux mains . Quelle surprise lorsque nous arrivons à l'embarcadère ! On se croirait au Cap Gris Nez un jour de novembre , ma parole ! Nous sommes en pleine purée de pois ! Nous y retrouvons nos  deux grandes pirogues à moteur, et une fois assis à nos places , nos pilotes distribuent une couverture à chacun pour nous protéger les jambes  . Pour garantir la poitrine ,  nous utilisons  les gilets de sauvetage comme coupe-vent . Nous mettons immédiatement en route et  c'est avec beaucoup de prudence que nous pilotes cherche l'étroit portail du plan d'eau de l'hôtel . Dès la sortie, ils mettent le cap sur Inn Paw Khone , en ayant soin de rester groupé  tous les deux et de suivre la côte  plus prés que d'habitude .Des touffes de jacinthes sauvages quelquefois surmontées d'un bouquet de roseaux semblent jaillirent brutalement devant l'étrave , nous obligeant à faire un écart . On voit déjà des pêcheurs au travail debout à l'arrière de leur pirogue . Quel courage car il ne fait pas bien chaud malgré nos protections , sans compter que l'air est gorgé d'humidité qui ruissèle partout sur les plats-bords .Dès que l'on y voit un peu mieux  ,les pilotes font  aussitôt monter les tours , ce qui aggrave notre situation . Par moment de timides rayons du soleil parviennent à percer la nuée , argentant par endroit  la surface du lac pour le plus grand plaisir de nos yeux . Nous doublons maintenant le pagodon doré, qui marque le milieu de notre route . Nous sommes étonnés par l'importance de la circulation malgré ces conditions déplorables .Au bout d'un moment on commence à deviner la silhouette de petites maisons sur pilotis , éparpillées à l'approche des jardins flottants . Encore un quart d'heure à fouiller le brouillard avec les yeux et voilà que surgit la haute silhouette du premier restaurant de Inn Paw Khone . Nous nous arrêtons un peu plus loin sur la droite du chenal, pour charger deux  bidons de gasoil  pour notre longue navigation .




            Nous  repartons aussitôt pour traverser la ville flottante plein gaz, étant donné le peu d'encombrement à cette heure . C'est amusant de voir les autochtones passer la tête par les fenêtres de leur maison, par pure curiosité, pour nous regarder passer . Après avoir remonté plusieurs "grandes avenues" , nous arrivons au portique marquant la sortie de la ville .Nous continuons notre descente plein sud vers l'extrémité du lac .La brume s'effiloche un peu mais la lumière reste blafarde et le froid intense . Nous doublons des quantités de bancs de jacinthes sauvages qui dérivent et nous croisons encore de nombreuses pirogues chargés jusqu'à la gueule de marchandises et de femmes le plus souvent coiffées de chapeaux coniques décorés de fleurs peintes .Des groupes de canards et d'oies se mettent à cancaner sur notre passage . Nous ne tardons pas à atteindre le village de Kyank Khant où nous arrêtons dans un atelier de tissage, spécialisé dans le travail de la fibre de lotus . Une fois que nous avons pris pieds sur le débarcadère, il faut grimper un escalier étroit pour atteindre une grande pièce où des ouvrières filent des fibres écrues sur des rouets pendant que d'autres s'activent devant leur métier à tisser .Nous sommes intrigués par un petit panneau comportant des carrés de couleur  différentes , accroché sur les métiers à tisser : selon Zaw c'est pour chasser les mauvais esprits ! La patronne nous guide ensuite vers la terrasse où l'on prépare les teintures dans de grands chaudrons chauffant sur la braise : des feuilles de nénuphars pour le vert et de l'écorce d'arbre pour le rouge . Nous passons rapidement par le magasin .






            Nous reprenons notre navigation assez vite car nous avons du chemin à parcourir . Vers 10h00 nous quittons le lac pour commencer à suivre la rivière qui en sort en décrivant de nombreux méandres . Un chapelet de maisons sur pilotis s'égraine le long de la rive gauche . Des mères , installées sur leur embarcadère privé , s'occupent de la toilette de leurs enfants nus comme des vers bien que la température ne soit pas encore formidable . Malgré tout, le soleil est venu enfin à bout de la brouillasse , rendant notre balade beaucoup plus agréable . La rive droite est envahie de  cultures de maïs , de tomates , et de courges .équipées d'un système d'arrosage à partir de l'eau de la rivière . D'après Zaw les terres fraichement labourées vont servir à planter de l'ail .Sur les flancs de coteau,  nous apercevons quelques pagodes dont les stupas dorés brillent au soleil  . Par moment le lit de la rivière disparait presque, tant il est envahi de jacinthes sauvages . Heureusement que notre pilote est assisté d'un guide, qui plusieurs est obligé d'intervenir pour trouver un passage qui n'est pas plus large que notre pirogue . En général il met les gaz à fond pour vaincre le frottement des végétaux tout le long de la coque . Et tout à coup nous débouchons sur un vaste plan d'eau : c'est certainement la rivière qui a envahi les berges un peu trop basse pour jouer les étangs . Le problème est pour trouver la sortie . Un peu plus en aval  , heureusement que nous sommes précédés par une autre pirogue de transport de marchandises car leurs occupants sont obligés de tailler carrément un chenal à travers une vaste étendue de jacinthes à grand coup de rames . Nous lui emboitons aussitôt le pas avant que la végétation ne  se referme derrière lui .




            Vers 11h00 nous commençons à voir, sur notre droite , les nombreuses stupas de la pagode Thar Khaung, datant du XVII ème siècle  qui a été restaurée entre 2002 et 2003 . Nous ne tardons à nous frayer un passage parmi la végétation flottante , pour pouvoir y accoster . Deux immenses escaliers couverts, défendus par deux  lions chacun ,  descendent jusqu'au débarcadère .Il faut se déchausser et garder les chaussures attachées à la ceinture pour pouvoir visiter les lieux . Parvenus en haut des marches , nous débouchons sur une vaste esplanade couverte de plus de trois cents stupas en briques , en crépi blanc ou doré . Certaines sont décorées de sculptures  et de bas reliefs . D'autres contiennent des statues de bouddha aux lèvres rouges-baisers . Une fois rechaussés ,  Zaw nous emmène visiter le village de Taryar Khone que nous traversons de part en part pour aller voir une distillerie d'alcool de riz . Comme nous l'avons déjà vu , ici aussi ils font fermenter dans de grandes jarres, le riz cuit préalablement ,additionné de levure . La distillation  est faite au feu de bois  comme d'habitude . Par contre, le système de refroidissement est différents : en effet les vapeurs alcooliques sortant de l'alambique par un bambou ,passe ensuite dans une poterie  à double parois , la plus petite étant remplie d'eau froide .  Puis nous passons à la dégustation ; comme d'habitude  le résultat est nul sur le plan gustatif , d'ailleurs les locaux le consomment avec du miel pour lui donner un peu de goût . Il produise de l'alcool de riz à 40 et à 60 degrés . Puis nous avançons jusqu'au troquet voisin ,dont la vaste salle occupe l'étage d'une maison sur pilotis, avec une superbe vue lac . Pour éviter les risques digestifs , nous nous contentons d'une fricassée de poulet accompagnée de riz vapeur . Un vrai menu d'hôpital !!  Nous mangeons à deux pour 10 000 kiaps , soit 7 dollars boissons comprises . En discutant avec le propriétaire j'apprends que ce matin ils ont fait un grand feu de camps dehors, pour se réchauffer autour, en famille : c'est le" chauffage central birman " car ici aucune maison n'est équipée d'un conduit de cheminée !



















            Nous regagnons ensuite nos embarcations pour aller voir un temple, sur l'autre rive cette fois , qui a la particularité d'être construit au ras de l'eau . Beaucoup de stupas sont en cours de restauration , aussi nous nous contentons de le contempler depuis la pirogue . Quelques stupas isolés forment de petits îlots envahis d'arbres ,qui tant soit peu ont bousculé la maçonnerie . Après plusieurs passages au ralenti pour pouvoir tirer des photos, nous mettons le cap sur Phekon, encore à deux heures de navigation d'ici . C'est l'occasion de faire bronzette à bord ,tout en admirant le paysage montagneux, qui défile sur les deux rives .Il y en a même certains qui , bercé par le ronronnement du moteur , pique du nez . La rivière finit par déboucher sur un immense lac appelé Moé Bye Dam , qu'il faut traverser en diagonale, pour atteindre Phekon vers 14h30 . A peine débarqués de nos pirogues , nous sommes accueillis par notre chauffeur de bus et son aide . Il n'y a plus qu'à prendre la route de Loikaw , encore distante d'une soixantaine de bornes . Après avoir longé un moment le lac  , nous nous mettons à grimper à flancs de coteau . Dans les interminables champs de maïs  qui bordent la route , c'est la moissons . D'ailleurs dans les villages que nous traversons un peu plus loin ,les cours  intérieures des maisons sont couvertes de grains de maïs  qui sèchent au soleil . Nous traversons la ville de Moepyal  dotée d'un grand barrage hydro-électrique . Peu après la sortie de la ville ,nous quittons l'état Shan , le plus grand  de Birmanie en superficie pour passer dans le  plus petit , le Kayah,  peuplé seulement de 300 000 habitants . Les routes y sont en mauvais état en tout cas , avec juste une bande de macadam au milieu de la chaussée et deux bas côtés en caillasses grossières . Pas facile de taper sur l'ordi dans de telles conditions . Une fois arrivés à Loikaw , Zaw et le chauffeur cherche notre hôtel pendant un bon quart d'heure , ce qui nous permet de voir le 18 trous plusieurs fois ainsi que le petit lac, avant d'arriver au Loikaw Lodge où on nous fait quitter les chaussures pour entrer dans le hall !! Les chambres sont relativement jolies mais bonjour la promiscuité avec un balcon commun et des enfants de voisins plus qu'envahissants !


              Après un peu de repos à la chambre consacré à la rédaction du blog et au classement des photos , nous retrouvons au restaurant de l'hôtel vers 19h00 . Le chef nous propose des lasagnes qui pour finir avec les nous reviennent à 35 dollars US pour deux avec la boisson . C'est vraiment très cher . Dommage de terminer notre périple birman par un hôtel pareil .

           

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