SOIXANTE SEPTIEME JOUR : LE 15 DECEMBRE 2019





       Le calme de Loikaw nous réussit apparemment car nous y faisons une nuit de bébé . Et puis ce matin , le réveil est royal ,face au lac sur lequel de frêles nuages de brume courent parmi les rayons du soleil .De notre chambre nous voyons que le taulier a allumé la cheminée  dans la salle à manger , une bonne invitation à descendre prendre le petit déjeuner ! Pour finir , il a quand même des avantages ce petit établissement à taille humaine qui tient plus de la pension de famille où nous nous promenons en chaussons sur les parquets . Ici , pas de grand buffet mais un service à table par un personnel attentionné , même si on nous sert un bol de haricots rouges alors que avions commandé des toasts avec confiture sur nos doléances d'hier soir . C'est  quand même très agréable de manger le dos à la cheminée et face au lac  . En discutant avec  le taulier je l'interroge au sujet d'un curieux instrument de musique qui traine à coté de la cheminée : il s'agit d'un "bambou-guitare"  fabriqué  dans les villages voisins et que l'on peut trouver pour 5 000 kiaps . Dommage que la wifi soit de mauvaise qualité au point de ne pas pouvoir transmettre de photo avec le blog . Désolé pour les lecteurs assidus , mais c'est la première fois en soixante six jours que l'article quotidien n'est pas accompagné d'un support image !



            Ce matin nous avons rendez vous avec Zaw vers 8h30 pour aller visiter les villages de  Pemsong  , de Pan Pet , et de  Rang Ku  afin de mieux connaitre les coutumes locales . Nous lui demandons de se rapprocher de son agence birmane pour nous programmer une excursion d'une journée au Rocher d'Or depuis Yangon car nous avons constater qu'avec les horaires d'avion aussi bien pour arrivée sur la capitale depuis Loikaw que pour la quitter le lendemain vers Hanoï, cela nous laisse presque deux jours de battement qu'ils seraient bien de meubler . Malheureusement , nous sommes dimanche et tout est fermé , il n'y a plus qu'à attendre demain . Nous aimerions pouvoir affréter un mini-bus qui nous prendrait directement à la descente de l' avion , pour nous conduire au Rocher d'Or distant  de deux cent bornes, et nous ramener sur Yangon  où notre nuit d'hôtel est retenu . Et puis il vaut mieux être déjà sur place dans la capitale pour ne pas louper notre vol international vers Hanoï le lendemain .






           Nous commençons par  traverser Loikaw tout en faisant quelques courses telles que de l'huile et des biscuits pour offrir en présents aux autochtones qui acceptent de nous recevoir . Il nous explique que nous  nous arrêterons un peu plus loin pour récupérer un guide local , notre Zaw préféré , ne se sentant pas de taille pour s'orienter dans ces contrées profondes et aussi pour converser avec les ethnies locales .Il parait que dans le petit état Kayah il y a 10 ethnies dont les Padaung appelés aussi Kayaw avec leurs fameuses "femmes-girafes" . Dès la sortie de la ville , nous traversons des rizières jaunies par le soleil ,où des groupes de villageois travaillent . Un peu plus loin notre bus est obligé de zigzaguer entre des chicanes de barbelé installées sur la route avec une casemate en sacs de terre construite dans le bas côté . D'au dessus on devine le casque brillant au soleil de quelques militaires  . Zaw nous dit que des contestataires descendent des montagnes et essaient de pénétrer en ville pour diffuser leurs idées .Ils seraient soutenus par les Chinois , du moins  officieusement, mais il ne préfère pas approfondir !  Nous traversons maintenant des champs de maïs ,complétement brûlés par le soleil ,  ce qui donnent l'impression qu'ils sont abandonnés . Zaw nous montre ensuite le petit lac de Ngwe Taung , qui veut dire lac de la "Montagne d'Argent"  . Ce n'est pas une retenue d'eau  à des fins  hydro-électriques  mais simplement destinée à  l'irrigation  . On peut y voir des "femmes-girafes" venues vendre leurs tissages et aussi se faire photographier par les touristes . Elles sont malheureusement accompagnées d'enfants portant déjà ces horribles colliers métalliques autour du cou et même des membres . Un spectacle que nous avons du mal à supporter !! Nous voyons également des éléphantes, avec de jolies défenses pour une fois , réduites à prendre la pose devant les touristes, faute de travail en forêt , la coupe du bois de teck étant interdite par le gouvernement .






            Dès que nous reprenons le bus , la route se met à attaquer la montagne . Autour de nous, ce n'est qu'une pépinière de petits monts pointus, couverts de forêt . C'est devant ce panorama que  nous arrêtons pour photographier un ensemble bouddhiste occupant le sommet d'un piton rocheux ; celui-ci ressemble à un  gros gâteau d'anniversaire surmonté de bougies, avec ses stupas à toiture d'argent et non dorées comme d'habitude  . En reprenant la route, nous enfilons une succession infernale de virages en même temps que celle-ci devient de plus en plus étroite .Nous traversons de petits villages où les maisons sont  construites en planches, avec des fenêtres fermées  et dotées de tas de bois importants . Il doit certainement y faire plus froid qu'à Loikaw . Sur notre trajet , nous traversons deux autres barrages de police avec chicane, avant de nous arrêter pour prendre notre guide locale , une jeune femme nommée Mu Lih  : Mu veut dire femme  et La pour homme en langue Kayan . Elle explique qu'ici dans la vallée , il y a 5 villages d'environs 30 maisons chacun , soit 300 habitants par village  . Au total il resterait à peu prés une centaine de femmes girafes authentiques , celles-là . Dans le premier village, nous rendons visite à Mu To, âgée de 82 ans : elle a posé sa  première spirale à 5 ans , puis a du changer plusieurs fois au cours de sa vie en fonction de la croissance , puis de ses modifications morphologiques  . Actuellement elle a 24 anneaux autour du cou , qui ne semblent pas trop la gêner dans la vie de tous les jours . Elle nous fait d'ailleurs une démonstration de sa position de sommeil . Comme nous la trouvons bien conservée pour son âge,  elle explique à Mu Lih que c'est parce qu'elle a toujours bu du vin de maïs ,en rigolant ! Mu Lih traduit le Kayan en Birman que Zaw tente de nous traduire en Français , mais là c'est plus hasardeux ! !



















        Mu Lih nous emmène ensuite faire  une petite balade en montagne ,qui a le mérite d'offrir de jolis panoramas sur la vallée , avec les cinq villages qui l'occupent . Nous empruntons par un étroit sentier qui serpente dans l'herbe sèche . Par endroit on passe sous des pins qui nous procure une ombre bien agréable . Curieusement lorsque nous arrivons sur la ligne crête, nous découvrons une grande croix . De très loin ,nous avons également aperçu la haute silhouette d'une église dotée de deux clochers : Zaw nous explique qu'il y a 6% de catholiques en Birmanie mais qu'ici dans l'état Kayah ils sont plus de 50%  . Nous  continuons à grimper jusqu'au premier petit sommet pour voir une stupa dorée et surtout le panorama à 360 degrés sur les montagnes voisines .En descendant Mu Lih nous explique qu'avant 1930 les autochtones habitaient au sommet des petites montagnes voisines mais qu' avec la croissance démographique ,ils ont du migrer vers le fond de la vallée plus fertile . L'eau vient uniquement de réserves remplies lors de la saison des pluies  car ici il n'y a pas de source ni de rivière  dans le secteur! Quand l'eau vient à manquer , ils  vont la chercher dans des villages plus éloignés avec des camions citernes chinois .



        Une  fois revenus dans la vallée nous reprenons le bus sur deux kilomètres pour aller visiter un second village construit à flanc  de coteau  .  Après avoir grimpé un large chemin de terre , nous sommes accueillis par  les enfants à qui Mu Lih  distribue aussitôt des biscuits . Puis elle nous emmène dans la maison d'une ancienne femme girafe appelée Mu Tu ,âgée de 65 ans ,qui nous raconte son histoire, par Mu Lih et Zaw interposés . Pour faire comme les autres petites filles et aussi pour obéir à ses parents , elle a posé ses premiers anneaux à l'âge de cinq ans . Elle a changé plusieurs fois au cours de sa vie et les a enlevés à l'âge de 55 ans à cause de douleurs  du dos, par ses propres moyens .La dépose du matériel a demandé pas plus d'une heure , par contre elle a dû maintenir son cou avec des foulards pendant trois mois . A notre demande, elle nous fait une démonstration de flexion -extension du cou ,sans problème, mis à part que le mouvement est saccadé .Elle a donné ses anneaux à sa soeur cadette qui les fait porter à sa fille ! La fille de Mu Tu a été épargnée de cette abominable torture quotidienne car elle a fait des études en ville . Comme le courant passe bien , au moment de se quitter, elle nous demande gentiment une séance photo que nous acceptons de bon coeur . En descendant un peu plus bas dans le village, nous allons dans la maison Mu Tia , une autre femme girafe âgée de 78 ans . Non seulement elle porte encore sa minerve de cuivre mais aussi des anneaux autour des jambes .  Comme nous lui achetons quelques petits bijoux artisanaux , elle nous montre qu'elle se sert de la spirale du cou pour y loger les billets de banque pliés . Un sacré numéro aussi  , Mu Tia .Elle non plus , n'a pas voulu que sa fille supporte le même sore qu'elle . Mu Lih n'oublie pas de distribuer un litre d'huile et quelques paquets de biscuit avant de la quitter. La fille  de mamie nous offre une tournée de vin de millet : les graines fermentent dans une cruche en céramique ; on y boit avec une paille plongeant jusqu' au fond : d'après Jean Marie ,Christian et Gérard c'est un peu acidulé mais buvable .Pour ma part , je préfère décliner l'invitation afin éviter de me recontaminer les boyaux ! En partant nous admirons sa maison aux murs de planches disjointes et au toit de chaume , sa cour où sèchent des fèves et du millet et sa porcherie pour finir en beauté .




        Il n'y a plus qu'à redescendre jusqu'au bus  pour aller voir un troisième village où Dominique achète un carillon qui teinte en haut des stupas . Il ne nous reste plus qu'à revenir sur nos pas pour casser la croûte dans le troquet où Zaw a retenu une table ce matin et où nous avons déjà commandé du poulet rôti- frites pour tout le monde . Quel bonheur lorsque nous constatons qu'il y a une pompe à bière sur le comptoir de la taule ! Deux minutes plus tard il y a sept bock avec un doigt de mousse comme il se doit , qui s'entrechoquent au dessus de la table devant Zaw chargé de photographier l'événement . Pour  finir nous rentrons à l'hôtel vers 15h00 pour s'occuper du blog et des photo en espérant qu'il y ait un peu plus de wifi que ce matin et surtout qu'hier soir ! Vers 19h00 nous nous réunissons dans la chambre de Michèle et Jean Marie pour goûter la bouteille de whisky birman que nous avons acheter tout à l'heure au restaurant .



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