SOIXANTE HUITIEME JOUR : LE 16 DECEMBRE 2019





    Encore une nuit de bébé ! C'est certainement du au calme des bords du lac de Loikaw ! A moins que ce ne soit la sérénité qui suit une journée de visite superbement remplie comme celle d'hier . La découverte des villages de Pemsong , de Pam Pet et de Rang Ku a été un grand moment d'émotion surtout avec cette rencontre des femmes girafes . Grâce à Mu Lih , notre interprète kayan , elles ont pu nous raconter leur vie quotidienne . Nous avons  également goûter le bonheur de Mu Tu , qui depuis 10 ans maintenant, s'est libérée  toute seule de son carcan métallique  : ce qui est encore plus admirable, c'est qu'elle a embarqué sa fille dans son mouvement de libération et qu'elle a eu le courage d'affronter le qu'en-dira-t-on d'une minuscule communauté .C'était aussi très émouvant de voir s'éclairer de bonheur le visage des enfants qui recevaient quelques biscuits de la part de notre guide locale . Et je ne parle pas du sourire radieux et partiellement édenté des mamie-girafes avec le litre d'huile dans une main et le petit paquet de gâteaux secs dans l'autre .La balade à pieds jusqu'au sommet de la petite montagne nous a aussi permis de voir l'ensemble de ce microcosme formé de cinq villages dont la survie communautaire est fortement intriquée et aussi de découvrir qu'ici le bouddhisme joue à part égale avec le catholicisme . Une sacrée journée,  particulièrement enrichissante que nous avons conclue agréablement par une dégustation de whisky birman , qui somme-toute ,se révèle tout à fait correct et ce pour 7 000 kiaps , soit un peut moins de 5 dollars US .







                Ce matin , au petit déjeuner , nous avons la surprise de voir que l'hôtel est envahi de femmes girafes ; elle reviennent d'un regroupement ethnique qui a eu lieu à Mandalay . Après une petite exhibition pour les quelques autres clients de l'hôtel , Zaw nous explique que nous les ramenons dans leur village appelé  Htay Kho  que nous devions aller visiter aujourd'hui . Avant de monter à bord , nous tirons l'incontournable photo de départ avec nos cinq femmes girafes de trois ethnies différentes comme le montrent leurs tenues   : les Kayaw , les Kayah et les Kayan . Pendant que je suis assis sur le banc dehors pour enfiler mes chaussures , la plus âgées d'entre-elles m'offre gentiment une chique de bétel car elle vient de s'en rouler une ! Comme je ne veux pas la vexer en déclinant l'offre , je me mets à admirer les nombreux anneaux qu'elle porte autour des jambes et je lui demande dans la foulée la  permission de la photographier . Etant donné qu'elle a l'habitude des réunions ethniques et donc des bains de foule , elle accepte volontiers .Ce matin , notre bus  est remplacé par deux minibus pour notre petit groupe de huit plus Zaw et nos femmes girafes . Une
vraie épopée !








            Vers 8h30 tout le monde est calé à bord et nous prenons aussitôt la direction de Htay Kho . Pour cela il faut d'abord traverser Loikaw avant de longer le lac de la Montagne d'Argent . Après avoir franchi les chicanes en barbelé d'un barrage de police, nous empruntons une petite route très bosselée qui traverse des champs de tabacs, où on peut voir de grandes feuilles pendues la tête en bas, sur un séchoir exposé au  soleil . Il y a aussi beaucoup de champs de maïs ,complétement brûlé par la sécheresse . Nous nous mettons à grimper à flancs de coteau tout en enfilant une succession infernale de virages . Tout autour de  nous se dressent de petites montagnes pointues couvertes  de forêts tropicales d'où émerge  par endroit le beau feuillage de bananiers .Nos passagères , d'abord intimidés , commencent à se lâcher en écoutant de la musique country , puis se mettent à  l'accompagner en chantonnant . Nous traversons quelques villages aux jolies maisons en planches et au toit de chaume puis nous attaquons la grimpette d'un petit col dont la pente est redoutable et où les épingles à cheveux nécessitent le passage de la première . Les pneus patinent à mort .Il faut dire que la bande de macadam est de plus en plus étroite . Dès que nous sortons d'un lacet , nous nous retrouvons au pied d'une rampe redoutable à plus de 20% .Plus nous approchons de leur village et plus nos passagères sont en effervescence et pourtant elle ne sont parti que depuis trois jours . Nous nous arrêtons plusieurs fois pour admirer le paysage , tirer quelques photos et aussi pour récupérer de notre passage au shaker qui dure déjà depuis une heure et demi . Nous sommes surpris par la petite taille de nos passagères dont le sommet du crâne atteint tout juste la poche de ma chemise .




            Vers 11h00 nous atteignons enfin le village de Htay Kho où habitent nos passagères et ça se voit à la joie qui éclaire aussitôt leur visage . Elles se dépêche de récupérer leurs sacs et les voilà qui disparaissent dans un chemin sans plus de formalité .De notre côté nous faisons connaissance avec Pawlu , notre guide local et aussi  notre interprète qui parle le kayaw .Il le traduira en Birman  à Zaw qui en principe nous transmettra les infos en Français dans la mesure de ses possibilités ! Il nous explique que dans le village il y a 40 maisons et environs 420 habitants .Ceux-ci cultivent du riz , du maïs , du millet , des concombres , des citrouilles et des piments bien sur . Nous commençons par descendre un chemin d'argile, taillé  profondément en son milieu par le ruissellement et poussiéreux à souhait sous le soleil . Nous nous arrêtons dans une première maison où une mamie-girafe se repose sur la terrasse ; nous sommes étonnés par la taille et le poids de ses boucles d'oreilles qui ont complétement déformé le lobe ,avec un  trou d'au moins deux à trois centimètres de diamètre . Pawlu , qui a emporté dans  sa hotte tous les cadeaux achetés par Zaw  , lui tend un paquet de feuilles de bétel , un petit paquet de noix d'arèque concassées et un sachet de chaux qu'elle prend religieusement dans les mains . Sa fille se contente de récupérer la bouteille d'huile et le paquet de biscuits . Après avoir fait nos adieux à la famille , nous descendons jusqu'au pont qui franchit un petit torrent puis nous avançons jusqu'au jardin d'enfants  ; là  vingtaine de bambins de trois à quatre ans s'apprêtent à manger un bol de riz accompagné d'un oeuf au plat .Nous leur distribuons à chacun une sucette . Pawlu en profite pour nous présenter son fils et sa fille . Après avoir réalisé une photo de famille pour la circonstance , il nous explique qu'il a quatre enfants au total . Nous avançons ensuite vers l'église du village construite par les Italiens venus ici en 1914 . Etaient ils  venus pour combattre les Anglais qui avaient colonisé la Birmanie , en tant qu'alliés de l'Allemagne ? Zaw ne sait pas!! L'intérieur de l'église est très sobre et nous sommes surpris qu'à huit jours de Noël , il n'y ait pas de crèche .Pawlu nous explique que celle-ci ne sera faite que le 24 décembre et que ce jour là tout le village descend à minuit pour la messe .




            Un peu en dessous de l'église notre guide nous montre le petit misée du village , avec des étagères couvertes d'objets usuels de l'ethnie Kayaw : des instruments de musiques tel que des cornes de buffle , des flûtes de paon en bambous , des cymbales en cuivre , et des gongs qu'il se sent obligé d'essayer devant nous . Nous voyons une grande lance qui sert à planter le riz , un tronc creusé que l'on remplit de vin de millet pour le conserver, un rouet pour filer des fibres végétales en vue de tisser , un ingénieux système de protection des épaules lorsqu'on porte un sac sur le  dos .Pawlu nous montre aussi une arbalète qui servait autrefois pour la chasse : ici on rencontre surtout des  sangliers et des cerfs . Nous quittons cette caverne d'Ali Baba pour grimper la rue principale vers le haut du village . Arrivés à mi pente nous passons devant un grenier à riz sous lequel sont stockés trois cercueils creusés dans un tronc d'arbre . Ils sont équipés de quatre petits pieds et possèdent une sorte de gouvernail à chaque extrémité : d'après Pawlu  , ces ailerons sont purement décoratifs . Le corps du défunt est exposé chez lui pendant deux ou trois jours avant d'être enterré au cimetière du village .




            Nous continuons à grimper un chemin pentu pour atteindre la maison d'une amie de Pawlu  , une très jolie Kayaw qui ressemble à une indienne d'Amérique du Nord , avec ses pommettes saillantes et son nez fin.  Elle nous reçoit sur sa terrasse pour nous donner un petit récital de chansons  qu'elle accompagne à la guitare bambou . Pour la remercier , Pawlu sort également de sa hotte du bétel , de l'huile et des biscuits qu'elle confie à sa petite fille .Il parait qu'ici le chef du village est choisi par les habitants tous les quatre ans . Nous faisons nos amitiés à la copine de notre guide puis nous continuons notre balade de maison en maison , distribuant ici une bouteille d'huile , là un paquet de biscuits ou un sachet de bonbons , mais surtout toujours une pile de feuilles de bétel , un sachet de morceaux de noix d'arèque et de la chaux ,accueillis avec beaucoup de plaisir  car ici on n'en trouve pas . Nous atteignons maintenant la maison  des parents d'une de nos passagères . Agée de 31 ans, elle est célibataire libérée apparemment et habite seule la maison  voisine où au passage Jean Marie , Gérard et Christian se refont une dégustation de vin de millet , toujours à la paille dans une cruche de céramique : malgré leur enthousiasme , je préfère rester sur ma réserve , d'autant que demain nous prenons l'avion et que nous avons une grosse journée en perspective avec 10 h00 de route , si nous parvenons  à  aller voir le Rocher d'Or. En  redescendant vers la rivière, nous apercevons les terrasses sur lesquels les villageois produisent leurs légumes . Le riz gluant vient de là-haut , sur les flancs de montagne dont on voit les traces de culture sur brûlis . En  regagnant  la route goudronnée pour aller manger , nous tombons sur l'aubergiste  du village chez qui nous devons manger , occupé à rôtir un porcelet  en le posant directement sur les bûches du feu ! Quant à nous , nous nous installons dans une petite salle attenante à l'épicerie,  pour manger le riz frit aux petits légumes et le poulet frit que Zaw a fait préparer à l'hôtel . Un café et nous reprenons sans plus tarder la route de Loikaw qui demande environs deux heures et demi ! Nous prenons quand même le temps d'acheter avant le départ une nouvelle bouteille de whisky birman à 4 000 kiaps , soit 3,6 dollars US!




            Ca beau être une route magnifique , offrant de superbes panoramas sur les montagnes voisines couvertes de forêts au détour de chaque virage ,le confort à bord est épouvantable avec les énormes ornières et les bosses de la chaussée , les pentes redoutables qui arrivent à nous faire glisser du siège , les épingles à cheveux et les a-pics vertigineux qui donnent froid dans le dos .Ce n'est déjà pas drôle quand on n'a qu'à se laisser conduire mais je ne vous explique pas l'horreur quand on tape sur un ordi !! Heureusement que je ne suis pas sujet au mal de mer ! Mais malgré tout ,j'ai de la misère à me caler avec les coudes pour ne pas glisser et avec les genoux pour que le portable ne vole pas à travers la voiture , histoire de garder les deux mains sur le clavier ! Aussi quelle libération lorsque nous arrivons à notre hôtel . En route Zaw a réussi à faire les réservations pour notre journée marathon de demain , moyennant 70 dollars US supplémentaires par personne . Nous ne serons que six étant donné que Michèle et Jean Marie préfèrent rester tranquillement à Yangon. C'est avec plaisir que nous retrouvons le calme de la chambre pour finir le blog et transférer les photos . Avec la wifi détestable de l'hôtel cela réserve encore une sacré partie de plaisir . Heureusement qu'il y a la récompense d'un bon cigare dégusté sur le banc devant le hall d'entrée en compagnie des trois chiens de l'établissement ! Vers 19h00 nous nous retrouvons dans la piaule de Michèle et de Jean Marie pour une seconde dégustation de whisky birman , cette fois à 3,6 dollars US .  Bien que ce ne soit pas écrit dessus "Grande Réserve" , il se révèle correct malgré tout bien qu'il semble taper plus sur la tête que le précédent . Aussi il est temps de descendre goûter les saucisses kayah proposé par le taulier .Assez relevées , elles accompagnent parfaitement notre assiette de spaghetti .

Commentaires

  1. Profitez de ces derniers moments passés et échangés avec ces personnages très attachants semble-t-il ! Bon retour . On attend votre appel téléphonique dès votre retour.




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