CINQUANTE HUITIEME JOUR : LE 6 DECEMBRE 2019






        Bonne fête de Saint Nicolas à tous les jeunes mâles et en particulier à mes trois petits garçons . Bonne fête Antoine ! Bonne fête Alexandre ! Bonne fête Maxime ! Comme à chaque départ en bateau, il faut se lever tôt et c'est très dur , surtout après deux mois de tribulations en Indochine . Comme à Yangon , Zaw a demandé à l'hôtel de nous préparer une boite à petit déjeuner que je descends chercher à 5h00 après une bonne douche fraiche , histoire d'avoir les yeux en face des trous . Nous complétons notre box avec la jolie assiette de fruits artistiquement présentée , offerte à chacun de nos passages à l'hôtel Mandalay City , en guise de cadeau de bienvenue . Nous avons tout juste le temps de casser la croûte et de rassembler nos affaires pour retrouver Zaw dans le hall à 5h45 .




            D'un coup de bus nous gagnons l'embarcadère sur les rives de l'Irrawaddy dans le noir total . Une fois sur les bords du fleuve , des porteurs se chargent du transport de nos bagages , heureusement car il faut descendre la pente raide des berges  puis emprunter une étroite passerelle se résumant à deux planches souples et un bambou tenu par deux matelots en guise de rambarde . Malheureusement cette fois nous n'avons pas de bateau privatif comme lors des autres navigations de notre périple  : Motaïba nous a trop bien traité jusque là et de ce fait nous nous sommes  vite habitués au  luxe . Il faut dans un premier temps s'installer sur les sièges qui nous sont réservés . Ce n'est pas le bagne quand même , ce sont des fauteuils confortables et nous ne sommes que trente passagers pour quarante places ! Pendant les manoeuvres d'appareillage , le commandant de bord nous fait un petit briefing pour expliquer le déroulement des dix heures de croisière . Une visite de village et une séance de maquillage au thanaka est prévue pour meubler et surtout rompre la monotonie de cette longue navigation de 10 heures .



             Vers 6h30 ,nous prenons le large , enfin façon de parler , même si l'Irrawaddy  est énorme , disons que nous gagnons le milieu du lit du grand fleuve et très rapidement nous grimpons sur le pont supérieur pour pouvoir admirer le lever de soleil qui embrase la rive gauche . Un premier plan de bateaux remontant le courant , chargés de sable et de graviers , nous procure de jolies silhouettes à contre-jour . Et la belle trace orange laissée par le soleil  à la surface de l'eau qui s’effrite avec les remous des hélices.Un magnifique spectacle que nous évitons de trop prolonger étant donné la fraicheur du vent vitesse . De retour en cabine , je trouve une prise 220 volts pour brancher l'ordi , je suis sauvé , je pourrais taper le blog pendant notre croisière , c'est le panard ! A peine ai-je aligné quelques mots que Christian nous prévient qu'un petit déjeuner est servi au niveau du pont supérieur . Bien que le soleil soit au rendez vous , il faut quand même enfiler un pull pour grimper là-haut . Sur notre droite ,nous avons la surprise de voir défiler la fameuse colline de Sagaing , truffée de pagodes blanches ou dorées ,qui émergent de la forêt , étincelant dans la chaude lumière du matin pour le plus grand plaisir de nos yeux . Nous ne l'avons jamais si bien vue , même lors de l'excursion spécialement consacrée à sa visite . La lumière de l'aube , les flots de l'Irrawaddy en premier plan et en plus la lente trajectoire  tangentielle de notre bateau , tout contribuent à rendre ce spectacle exceptionnel . C'est le passage sous le grand pont métallique enjambant le grand fleuve qui annonce la fin de cette superbe exhibition bouddhiste .




            Il est temps de passer à table car les oeufs brouillés servis par le steward commencent à refroidir avec l'air du large . Un second petit déjeuner à deux heures d'intervalle  , c'est dur quand même , mais ça a le mérite d'occuper les esprits et puis c'est royal de manger en voyant défiler les rives de l'Irrawady devant nous : on va finir par se prendre pour Ruyard Kippling ou Sommerset Morgan au siècle dernier ! Par moment le capitaine baisse le régime du moteur : en y regardant de plus prés, nous constatons que c'est souvent à l'approche d'une bouée rouge balisant le chenal . Il doit certainement craindre des hauts fonds ou des bancs de sable faiblement recouvert d'eau . D'ailleurs la plus part du temps ces ralentissements s'accompagnent de changement de cap . Il a l'air de connaitre son affaire en tout cas ! C'est d'autant plus délicat  pour lui  que par moment , nous nous retrouvons dans une nappe de brouillard .A un moment donné , la situation devient si délicate que deux matelots se mettent à sonder de part et d'autre de la proue avec un long bambou étalonné : après avoir ralenti les machines le pilote sort de son poste pour interpeller le mousse de bâbord et celui de tribord à tour de rôle avant de choisir son cap . Nous avons vraiment eu de la chance  d'avoir une si belle lumière lorsque nous avons longés la collines aux 500 temples car la brouillasse reste accrocher un moment . Nous passons maintenant à proximité d'étroites pirogues de pêcheurs creusées dans un tronc d'arbre , qui balancent dangereusement dans les remous que nous laissons derrière nous .C'est effrayant ! Nous en voyons ensuite deux barques semblant escorter quelques troncs de teck comme nous l'avait expliqué Zaw  .





            Dans la cabine nos épouses respectives ont sorti leur crochet pour s'occuper . Je n'y connais rien mais je trouve qu'elles détricotent plus que l'inverse ; à ce rythme elles vont finir la journée avec une pelote neuve!!A côté , Christian se plonge dans la lecture d'un guide Lovely Planet pendant que Gérard et Jean Marie opte pour la bronzette sur le pont supérieur . Sur les rives on aperçoit des villages où les toits de palme et les maison sur pilotis sont du plus bel effet , surtout qu'ils semblent sortir juste la tête d'entre les palmiers et les bananiers . Au bas de la pente de la berge , leurs pirogues colorées ont été tirées sur le sable ou se balancent nonchalamment au mouillage . Sur les  bancs alluvions voisines les cultures raient de vert l'ocre de l'argile .  Un peu plus en aval , car nous descendons le courant pour aller à Bagan , situé au sud ouest de Mandalay , nous sommes intrigués par des bateaux de bois accouplés par grappe de quatre ou cinq ; en y regardant de plus prés nous voyons qu'il s'agit de chercheurs d'or qui filtrent l'eau du fleuve mécaniquement avant de la rejeter en faisant de gros bouillons .




            Vers 10h00 , nous rapprochons la rive droite du fleuve , mais cette fois ce n'est pas pour éviter un haut fond ou un banc de sable ,mais pour accoster et  aller visiter le village de Lekkha Bin . Une fois la manoeuvre terminée , les matelots posent les deux planches de la passerelle avant de s'installer à chacune des extrémités du bambou qui sert de rambarde . Il faut ensuite gravir la pente argileuse de la berge  pour atteindre un petit sentier  . Après avoir traversé des champs de cacahuètes , nous atteignons la première maison  du village où un veau vient de naitre,  à en juger par l'humidité de son pelage et les plis cutanés qui lui strient le dos . Ici aussi les maisons sont construites sur  des pilotis d'au moins deux mètres à cause des crues sévères  de l'Irrawaddy .  Les murs sont faits comme souvent, de tressage de lamelles de bambou , mais ici de deux couleurs avec un joli motif jacquard comme sur les pulls de ski . Un peu plus loin nous voyons la récolte de sésame sécher devant  un groupe de trois habitations . A côté des meules de foins et de pailles sont stockées à l'abri de l'humidité sur des planchers perchés en haut de pilotis . Nous assistons aussi à la fabrication de chapeaux en paille de riz (en paille de blé nous dit Zaw ... !) . L'artisan nous explique qu'il fait une tresse  d'un bon mètre de long avec 7 brins de paille  . Il coud secondairement  celle-ci en spirale ,à l'aide d' une vieille machine à coudre manuelle ,sur laquelle il a installé un petit moteur électrique . Plus loin,  c'est un paysan que nous voyons broyer des herbes à l'aide d'une trancheuse,  mue par une pédale fabriquée avec un bambou et deux ficelles . Des femmes, coiffées d' un chignon tenu par un grand peigne ,commencent à préparer le repas en coupant des légumes pour la soupe, qui boue déjà sur le feu de bois .  Dans un petit enclos d'autres villageois ont préparé des plans de riz , d'un vert éclatant au soleil , mais encore trop petit pour être repiquer .D'après Zaw il y aurait une école , une pagode et un monastère dans le village .





            Au bout d'une heure de visite , nous regagnons le bateau , pour certains , munis d'un nouveau chapeau de paille .Après avoir fait demi-tour nous gagnons le milieu du lit qui est beaucoup plus large maintenant que ce matin à Mandalay . A peine avons-nous fait quelque kilomètres que nous passons à droite d'une grande île peuplée d'arbres  . Notre pilote se met tout à coup à serrer la rive droite pour éviter d'énormes péniches chargées de sable jusqu'à la gueule qui sont bloquées sur des hauts fonds . Elles n'ont plus qu'à attendre une grosse pluie pour sortir de là ! Notre pilote redoute de prudence car il arrive que notre bateau talonne aussi , obligeant les passagers à évacuer le bateau et à finir l'étape de Bagan par la route ! Les matelots sont de nouveau mis à contribution , armés de leur grand bambou étalonné . A ce rythme là ,nous ne sommes pas rendus. Nous profitons de ce ralentissement pour prendre en photo des transporteurs de bambou par flottaison . Perchés sur leur barque , il conduise tant bien que mal cette immense radeau carré tout en ayant soin d'arroser leur fret pour qu'ils ne se fendent pas .






            Vers midi nous nous installons à l'une des dix tables de quatre qui sont dressées sous l'auvent . On nous sert un pho à base de pois chiches et d'oignons frits , puis du poulet avec petits légumes et riz bien sur . Et comme nous avons été sage , nous avons droit à un dessert : des tablettes de caramel au sésame et aux cacahuètes et aussi au tamarin qui est un peu acidulé . Après le repas chacun essaie de s'occuper comme il peut car nous en prenons quand même jusqu'à 17h30 .Sur les rives nous voyons à un endroit de véritables champs cultivés sur des kilomètres de dépôts limoneux . Sur d'autres banc , certainement plus sableux , donc incultes , ce sont des hameaux de pêcheurs qui se sont installés pour la saison sèche avec de sommaires cabanes de branchages et leur pirogue retournée sur la plage . Parfois on voit de grands filets qui sèchent au soleil. D'autres ont planté des cannes dans le courant avec certainement des filets tendus entre deux .J'ai bien l'impression que des pêcheurs habitent carrément leur barque , sans s'occuper de construire une cabane sur la plage car on voit un abri en demi-lune de deux à trois mètres de long à l'arrière ! On constate aussi que beaucoup d'autochtones rassemble du bois de flottage pour le charger ensuite dans leur barque .  C'est impressionnant toute la vie qui dépend du grand fleuve et je ne parle pas des chercheurs d'or et des transporteurs de graviers et de sable .Partout le long de son cours on remarque beaucoup de stations de pompage qui permettent l'arrosage des champs de maïs dont on devine les plumeaux dépasser des buissons .





           Sur la dernière longueur , nous assistons au coucher de soleil  sur l'Irrawaddy avec une petite dizaine de pagodes qui se découpent à contre-jour sur la rive gauche . Ce n'est pas trop photogénique car le soleil est encore un peu haut, mais c'est tout de même une belle conclusion pour cette sympathique croisière sur le grand fleuve . Nous débarquons  du bateau vers 17h15  dans une cohue pas possible ,avec les porteurs qui se bousculent pour choper une valise à remonter jusqu'au bus , histoire de  gagner 1000 kiaps . Quant à nous, il faut passer sur une planche flexible, avec le sac à dos , l'appareil photo autour du cou et le bagage à main . Pas facile de garder l'équilibre dans de telles conditions avec des genoux qui partent dans tous sens !!  En faisant la route qui mène à l'hôtel Umbra , Zaw nous explique que Bagan , ancienne capitale du XI ème au XIII ème siècle compte aujourd'hui 200 000 habitants et qu'elle est divisée en trois quartiers distincts dont Old Bagan et New Bagan . Sur l'espace de trois siècles il aurait été construit ici , 12 000 monuments religieux , mais que seulement 3800 seraient parvenus jusqu'à nous . De plus le gros tremblement de terre de 2014 en aurait détruit prés de 300 . Dans les guides , on parle plutôt de 2000 pagodes !
          Une fois installés dans les chambres , nous nous occupons des photos et du blog avant de nous retrouver au resto de l'hôtel pour un super dîner spectacle au bord de la piscine .









           

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