Aujourd'hui c'est férié au Cambodge , c'est la Fête de
l'Indépendance datant du 9 novembre 1953 . Et puis à partir de
lundi c'est aussi férié pour 3 jours : c'est la Fête de l'Eau ,
célébrée dans tout le pays . Nous espérons que les douaniers de la
frontière laossienne travailleront mardi , le jour de notre
passage au Laos ! Ce matin ,c'est plus cool car nous avons décidé
avec Ka de partir à 7h30 , pour voir un premier temple perdu dans
la jungle à 60 bornes d'ici , avant de monter plein nord sur Préah
Vihear, près de la frontière thaïlandaise . Il est temps de faire
nos adieux à Angkor qui figurera dans notre top 10 des étapes
inoubliables . Merci Ka d'avoir su nous mettre en valeur des sites
tels que Angkor Vat , le Bayon , Tap Prom et bien sur la
"Citadelle des Femmes" en évitant au maximum les troupeaux de
touristes et merci d'avoir éclairé notre lanterne de néophyte sur
cette mystérieuse civilisation Khmer, sans tomber dans le
livresque . Du très bon boulot de guide !






C'est donc avec un pincement au coeur que nous
quittons définitivement Siem Réap par la nationale 6, pour
grimper d'abord vers le nord est ,en direction du complexe
archéologique de Beong Méalea .Hier Ka nous a parlé de ce grand
pont de 4 jours fériés en suivant avec un dimanche au milieu qui
va être suivi dans tout le pays avec des courses de pirogues , des
feux d'artifices et des bals . Il nous a expliqué qu'au Cambodge ,
ils n'ont pas de vacances mais ils ne travaillent que onze mois
sur douze à cause des très nombreux jours fériés comme le 1 er
janvier , ou le premier jour du calendrier lunaire qui tombe en
avril.,etc.... Ici on fête aussi Noël avec distribution de cadeaux
aux enfants , mais ce n'est pas un jour férié . Il nous a
également expliqué que la jeunesse cambodgienne est touchée par
un nouveau fléau , l'alcoolisme . Cela nous surprend car la bière
est chère , entre 1,5 et 2 dollars US la boite et je ne parle pas
de l'alcool de riz qui est une véritable purge !
Après avoir contourné plusieurs ronds points
joliment décorés , ici d'une Apsara , là de deux éléphants se
tenant par la trompe , nous quittons définitivement la ville .
Déjà de petits commerçants s'installent sur les bas-côtés pour
vendre des pots de sucre de palme . Nous ne tardons pas à
retrouver le patchwork des rizières dont les nuances de vert sont
joliment mis en valeur dans la chaude lumière du matin . Nous nous
arrêtons quelques kilomètres plus loin pour voir de plus prés des
étales où l'on vend le fameux riz gluant au lait de coco et aux
graines de soja . Celui-ci est cuit dans des tronçons de bambou
d'une vingtaine de centimètres , posés inclinés sur un barbecue et
obturés à la partie supérieure par un bouchon de paille de riz ,
pour cuire à l'étouffée . Une fois cuit , il faut émincer le
bambou à la machette : c'est une opération délicate car il faut
enlever de fines pellicules de bois sans le casser complétement .
Le client peut alors l'ouvrir avec les doigts comme on pèle une
banane .Ce n'est pas mauvais mais moins bon, à mon goût ,que le
riz gluant cuit dans des feuilles de palmiers ou de bananiers ,que
nous avions dégusté au marché aux crabes de Kep .




Au bout d'une heure ,nous empruntons une petite
route à gauche qui nous permet de mieux voir les festivités de
célébration de l'indépendance : dans certaines écoles ,on voit les
élèves en uniformes, alignés au pied du drapeau national rouge et
bleu avec par dessus la silhouette d'Angkor Vat . Devant beaucoup
de maisons particulières flotte le pavillon national .De la
musique retentit déjà u n peu partout , des ballons de toutes les
couleurs sont accrochés aux arbres . C'est vraiment la "Fête
Nationale". Dans le village suivant, nous vivons un grand moment
de bonheur : toute la population s'est rassemblée sur une petite
place de terre battue, pour faire cuire du riz à sec dans de
grandes poêles directement sur la braise; ensuite celui-ci est
pillé dans des mortiers en pierre posés à même le sol à l'aide de
grands pilons de bois . Spontanément nous retrouvons avec un bol
de céréales garni de deux bananes dans les mains, offert avec un
grand sourire , c'est prodigieux . Ils n'ont rien ces Cambodgiens
mais ils partagent tout . Une grande leçon ! Il faut alors se
soumettre à une série de photos de famille auxquelles même les
flics en unif participent dans un brouhaha indescriptible à peine
couvert par les hurlements de la musique . Pendant que nous
épongeons les flocons de céréales avec nos bananes décortiqués ,
des autochtones se mettent à se trémousser nonchalamment au rythme
de la musique . Dommage que nous sommes obliger de quitter cette
liesse car nous avons 280 kilomètres à parcourir aujourd'hui et
deux grosses visites de temples .





Vers 9h30 nous atteignons Béong Méaléa qui est ouvert
au public depuis peu , en 2011 , suite à l'intervention des
démineurs germaniques . Ils ont neutralisé plus de cinq cents
mines anti-personnelles et des centaines d'autres explosifs
laissés par les Khmers Rouges en 1979 . Comme dans beaucoup de
temples nous commençons par emprunter l'allée " ro-iale" comme dit
Ka , pavée de grandes dalles en pierre et bordée de balustrades
en forme de naja aux têtes magnifiquement sculptées . Dédié à
Bouddha , il a été construit à la demande de Suriavarman II , donc
au XIème siècle, selon un plan carré avec des douves autour , deux
murs d'enceintes concentriques , quatre portes selon les points
cardinaux : c'est un mini Angkor Vat qui a peut être servi de
modèle à son frère cadet, mis à part qu'ici il n'y a qu'une tour
en forme de pain de sucre et non cinq , représentant l' Himalaya
, le Méru , le toit du Monde . Dès que nous approchons du temple
nous constatons que la plus part des bâtiments se sont écroulés
suite à l'envahissement de la jungle : ici aussi , comme hier à
Tap Prom les fromagers ont soulevé les murs d'enceinte et la
galerie couverte en infiltrant de puissantes racines à travers les
joints de la maçonnerie . C'est affreux de voir ces pieuvres
géantes engloutir de tel joyaux d'architecture . Comme ce temple
ne fait pas parti du Patrimoine Mondial protégé par l'UNESCCO , il
est resté dans l'état où l'ont trouvé les archéologues en 1920 . A
l'intérieur de la cour centrale ,la tour principale est à l'état
de puzzle géant ; par endroit on arrive à identifier des tronçons
d'Apsara , ces fameuses déesses qui dansent en se contorsionnant .
Ici on trouve une tête décorée d'un jolie coiffe , là des pieds ,
plus loin on devine les hanches couvertes d'une jupe :de grands
arbres se disputent l'énorme tas de pierres.





Vers 11h00 nous reprenons la route pour traverser une
région riche en cultures . Il y a moins de rizière car nous sommes
dans une région sèche : ici on cultive le manioc , le bananier ,
le poivrier . Ka nous montre aussi des plans d'arbres à noix de
cajou . Dans le lointain , nous apercevons des forêts d'hévéa .
Par moment nous longeons des plantations de cannes à sucre .Nous
remarquons que les cocotiers sont moins présents dans cette région
.Ici les maisons traditionnelles sur pilotis sont moins haut
perchées sur leurs échasses . Faites souvent de planches
disjointes , la plupart ont des toits en paille de riz , plus
jolis que ceux tôles rouillées ! Les petites montagnes posées au
bout de la plaine, que nous voyons maintenant, correspondent peut
être aux vieux volcans éteints depuis longtemps, où les Khmers
venaient chercher leurs blocs de latérite pour construire leurs
temples .Ka nous montre des habitations neuves , construites en
dur au milieu d'un lopin de terre , sur la gauche de la route .
Elles sont destinées aux militaires , très nombreux dans la région
depuis la fin des Khmers Rouges en 1979 : le gouvernement voudrait
qu'ils se reconvertissent dans l'agriculture mais beaucoup ont
déjà renoncé .




Il est déjà 13h30 lorsque nous arrivons à l'hôtel
Preah Vihear Boutique ,perdu au milieu de nulle part . Il faut
dire que depuis trente bornes nous ne voyons plus ni culture ni
village ; ici la nature est retournée à l'état vierge . Une fois
nos bagages déposés dans les chambres , nous grimpons au
restaurant , installé au premier étage . De là , la vue sur le
jardin et la piscine est magnifique . Pour simplifier nous
prenons tous un "fish and chips" avec une bière . Comme nous
avait prévenu Ka , il profite de leur situation pour imposer des
tarifs prohibitifs car nous en prenons pour 21 dollars US par
couple !




Dès que nous terminons notre café ,nous reprenons la
route sur 30 bornes pour atteindre le pied de la montagne Dangrek , haute de 600 m sur
laquelle est construite le temple de Préah Vihear . Pour les bouddhistes elle représente la montagne sacrée , la Montagne Méru Là , nous
grimpons à bord d'un pick-up double-cabine et très haut sur
pattes, pour atteindre le sommet . Ka en profite pour nous montrer le
poste frontière thaïlandais, sur le mont d'en face . Pas étonnant
que nous voyons des militaires traîner un peu partout . On passe
devant des casemates en sacs de terre creusées par les Khmers
Rouges .Nous grimpons un petit chemin à pieds , qui nous mène à
l'entrée de la voie "ro-iale" pavée de grosses dalles de gré rose
et bordée de deux balustrades en forme de naja ,dont les têtes
sont finement sculptées . Nous continuons ainsi l'ascension de la
montagne, en alternant des portions de large allée et de large
escalier . Nous finissons par déboucher sur un premier plateau
occupé par un vaste bâtiment étroit et long dont les frontons sont
ornés de bas-reliefs . En y regardant de plus pré , nous voyons
qu'il s'agit d'un temple dédié à Shiva . D'après Ka , il daterait
du début du XIIème siècle sous le règne de Suryavarman I , puis Suryavarman II . Entièrement construit en gros blocs de gré rose , il a
de la gueule quand même sous le soleil de fin d'après midi ! Par endroit on se croirait à Sachsawuman prés de Cuzco , tant la construction est cyclopéenne . Parvenu de l'autre côté du plateau herbeux , nous empruntons à
nouveau un vaste escalier pour parvenir au temple supérieur , de
la même facture que le premier, avec de magnifiques frontons
finement sculptés . Il a une forme de croix vu du dessus ,dont
chaque branche est orientée selon les points cardinaux . A l'intérieur du dernier bâtiment Ka nous montre l'emplacement du "Linga" , bien caché au milieu du temple . Les
voûtes ont été restaurées par des archéologues français pendant le
Protectorat et c'est grâce au gouvernement français que les
revendications territoriales de la Thaïlande qui désirait
récupérer cette région , n'ont pas abouti . Il avait fallu à
l'époque que des navires français s'ancrent devant le Palais
Royal thaïlandais pour calmer les esprits . Malheureusement la brouillasse de chaleur couvrant la plaine ne permet pas de profiter du panorama , une fois parvenu au bout du plateau rocheux qui tombe à-pic . Par contre Ka nous y montre une grotte qui a abrité des ermites dès le IX ème siècle . Par son site prodigieux , perché en haut de la montagne , et par sa construction cyclopéenne , cela en fait un des plus beau temple que nous ayons vu au Cambodge . Pas étonnant que l'Unesco l'ait pris en charge .





Nous rentrons ensuite à l'hôtel pour goûter sa jolie
piscine . Grande certes , elle se révèle salée et un peu froide .
Une heure de récupération à la chambre semble nécessaire malgré
tout puisque mon indicateur d'activité affiche déjà 124 % . Pour
le repas du soir pas question d'aller ailleurs qu'à l'hôtel , nous
sommes coincés en rase-campagne .
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