QUARANTE QUATRIEME JOUR ;LE 22 NOVEMBRE 2019




         Enfin , un matin où nous ne sommes pas persécutés par un timing serré ! Ouf ! Que du bonheur ! Pouvoir enfin prendre un café au lit tout en consultant sa boite mail , répondre aux amis , les féliciter pour leurs commentaires , parfaire un article du blog ou simplement ajouter une photo au texte sans regarder sa montre ! Le panard ! Et puis bien sur ,regarder par les grandes baies de la chambre le Mékong , toujours lui,  qui commence à prendre des couleurs  argentées  ce matin  , rien à voir avec la palette dorée d'hier soir, et ces jolis petits nuages de brumes qui s'effilochent sur le sommet des montagnes toutes proches . De la vraie "barbe à papa" que l'on déchire du bout des doigts ! Après avoir trainé dans notre spacieuse chambre pour nous préparer , il faut grimper au sommet du parc pour aller prendre le petit déjeuner dans la grande salle de restaurant qui s'ouvre largement sur le méandre du Mékong . Nous y assistons à une lutte acharnée des rayons magnésiens du soleil  avec un groupe de petits nuages qui ne veulent pas s'avouer vaincus aussi facilement que cela .




                Comme convenu avec Sun nous quittons l'hôtel vers 8h00 pour nous rendre sur le  petit marché de fruits et légumes de Pak Beng . Nous y sommes accueillis par une autochtone portant une capuche noir avec des motifs brodés de couleurs vives et vêtu d'une jupe étroite, brodée également ,qui vend sa production de tissage . Sun nous explique qu'elle est de l'ethnie Taï Dam originaire de la région de Dien Bien Phu au nord du Laos, où tout le monde porte des bonnets noirs d'où leur nom . Bien que nous commençons à être un peu blasés par ces petits marchés , nous y trouvons des choses nouvelles comme des paquets d' intestins grêles de porc non vidés qui cuisent sur les barbecues à coté de tronçons de boa , reconnaissable par les dessins géométriques sur ses écailles .Comme fruit nouveaux Sun nous montre un cousin du lichees qui poussent en grappes sur un genre de palmier et qui s'appelle "longan". On voit aussi tout un étale de desserts , souvent à base de riz , de lait de coco , voir de chair de coco  râpée ou de tarot , souvent teintés de couleurs vives comme le rose ou le vert ,grâce à des colorants naturels .Ce sont surtout de vieilles femmes qui vendent sur ce marché  et il n'est pas facile d'y prendre des photos  .
















           Nous reprenons ensuite les voitures pour nous rendre dans un joli hôtel construit sur les bords du Mékong : il est tenu par un jeune  français sympathique , de 34 ans . Il nous présente son épouse Wendy Leggat , qui s'occupe d'une des rares réserves d'éléphants du Laos, installée sur l'autre rive ,qui s'étend sur environs 40 hectares . Elle nous fait d'abord traverser le magnifique potager de l'hôtel , très fertile à cause de la qualité du limon du grand fleuve, puis  d'un coup de pirogue , elle nous emmène dans son domaine en faisant bien attention de négocier avec le courant , violent à cet endroit . Une fois sur la terre ferme , nous grimpons un petit sentier qui part à l'assaut d'une véritable dune de sable déposée là par le fleuve . Grâce à des clayettes de lames de bambous amarrées sur le sol , nous parvenons à progresser sans trop nous enfoncer ni sans trop remplir nos chaussures .Wendy , ancienne assistante vétérinaire amateur pour payer ses études, mais surtout dévorée par la passion des éléphants , nous livre  en vrac ses connaissances sur ces  sympathiques pachydermes d'Asie .Elle commence par nous expliquer qu'ici dans la réserve , elle s'occupe  pour l'instant de trois femelles et  d un mâle mais  qu'elle est  en cours d'acquisition d'un cinquième animal . Nous ne verrons pas le mâle   car il est actuellement en isolement dans la forêt , attaché à l'aide d'une chaine  de 60 mètres de long , par une  des pattes arrières étant donné qu' il est en rut . Wendy nous présente la plus jeune des femelles, âgée de 19 ans  qui a le plus d'ancienneté dans la réserve, puis celle du milieu agée de 30 ans qui n'est ici que depuis 9 mois et enfin la "mamie" ,âgée de 60 ans ,qui  a travaillé toute sa vie dans une plantation.  Chacune d'entre elles a son cornac propre, qui le plus souvent ,passera toute sa vie avec l'animal . Wendy a donc beaucoup appris à leur contact . La longévité moyenne de l'animal est de 60 à 65 ans .






            Nous avançons le long d'un sentier dans la  forêt d'où nous dominons  le fond d'un vallon : c'est ici que les cornacs ont décidés de nous montrer les trois femelles qui commencent à sortir de derrière les buissons . Wendy nous explique que les trois femelles sont inséparables et qu'elles sont toujours entrain de se caresser et de se faire des câlins à grands coups de trompe . Ce long appendice est percée de deux narines à son extrémité qui est dotée d'un doigt en Asie et de deux en Afrique .Elle nous montre qu'ici en Asie les éléphants n'ont que de petites défenses contrairement à leurs homologues africains qui  en  ont de grandes pour fouiller la terre afin de trouver leur nourriture . Ici il ne pèse que 3  tonnes au lieu de 7 ou 8 , ce qui ne les empêche pas de manger 250 kilos de verdures , surtout des bambous .Ils  sont dotés de seulement 4 grosses molaires avec lesquelles ils sont capables de broyer de grosses branches . L'état des oreilles permet de connaitre leur age : en effet celles-ci sont plus déchirées chez les plus âgés. Ils ont 4 ongles aux pattes avants et 5 aux pattes arrières . Passionnée qu'elle est , elle nous explique aussi que le dessous de leurs pattes sont très sensitifs et qu'ils  ont détecté hier le tremblement de terre bien avant les humains : ce serait à cause de lui que nous aurions été privés d'électricité .

















           Maintenant qu'elle a son équipe bien en main son second challenge serait de parvenir à une reproduction en captivité , ce qui n'a jamais eu lieu et cela pour de multiple raison : le cycle de la femelle est très long  d'une part . D'autre part le pic hormonal de l'ovulation ne se traduit pas par des signe particuliers , il faut donc la déterminer par prise de sang . Troisièmement les mâles , qui n'ont jamais connu la vie sauvage ont perdu l'instinct de courir après la femelle . Il existe bien l'insémination artificielle mais celle-ci coûte 70 000 dollars US et n'est pas garantie !

        Une fois que nous commençons à mieux  connaitre  ses trois protégées ,Wendy nous propose de leur donner quelques bananes à manger . La plus  jeune a tendance à vouloir prendre le tour des deux autres en se dépêchant d'approcher sa trompe de notre main . Pour que l'opération se passe bien il faut poser délicatement le fruit au bout de la trompe , près du doigt qui se replie aussitôt .Puis nous les accompagnons pour une petite balade  en forêt ,en suivant chacune d'elle par petits groupes de trois ou quatre .En route, elles n'arrêtent pas de casser des branches  ou des feuillages ou surtout des bambous qu'elles enfoncent dans leur gueule à grands coups de trompes . D'après Wendy elle passe pratiquement 18 heures par jour à manger et ne dorment que par petit somme d'une demi heure . A un moment nous croisons un troupeau de vaches qui se mettent à détaler devant la masse des trois pachydermes . Nos trois femelles  , à leur tour ,se mettent aussitôt à barrir tout en fuyant à travers la végétation , sans plus se soucier du chemin , puis nous les voyons se blottir les unes contre les autres autour de l'ainée, tout en barrissant à tout va et en  se pissant  dessus. Une fois calmées , nous reprenons notre balade jusque vers la rive du fleuve . Les deux plus jeunes se dépêchent alors de descendre la dune de sable avec une agilité remarquable . Arrivées au bord de l'eau , elles commencent par boire ,en remplissant leur trompe de 8 à 10 litres d'eau qu'elles vident ensuite dans leur gueule . Comme la plus âgée se fait trop désirée , les deux  jeunes finissent par se mettre à l'eau,  d'abord doucement , puis en immersion totale , la trompe servant de tuba ! La plus âgée finit par les rejoindre en descendant prudemment la pente de sable . On voit bien que la pauvre est vieille et qu'elle souffre de rhumatisme , elle qui a travaillé près de quarante ans dans une plantation . On voit d'ailleurs quand elle passe devant nous que sa colonne vertébrale est complètement déformée . Une fois en bas de la pente elle se contente de boire un coup , perchée  sur un rocher mais ces ablutions se limitent à ça . Puis elles nous font leurs adieux en regrimpant la dune,  conduites par leur cornac respectif . Une formidable approche des éléphants dans un cadre naturel superbement présentée par quelqu'une passionnée qui sait transmettre son amour pour ces pachyderme . Merci Wendy ! Pour ce que ça intéresse : www.mekongelephantpark.com tel :00856(0) 20 55 320 069










            Nous quittons Pak Beng vers 11h30 pour nous rendre à Oudomxay distante de seulement 130 km mais comme la route est très mauvaise, il faut compter 4 heures et surtout mettre sa ceinture à cause des bosses . Très vite nous nous rendons compte que cette mise en garde n'a rien de superflu et d'ailleurs plus d'une fois , nous nous cognons sur le plafond en décollant sur une bosse . Nous commençons par suivre la vallée du Beng , affluent du Mékong dont le confluent est à Pak Beng . En  découvrant le lac de barrage à une vingtaine de bornes en amont nous comprenons pourquoi il y avait si peu d'eau dans la rivière en sortant de la ville . Après avoir quitté une zone riche en rizières ,nous parcourons un haut plateau vallonné, couvert de grandes plantations de bananiers . Vers 13h00 nous parvenons dans un village où l'un de nos chauffeurs possède une taule et Sun , bien sur , décide d'arrêter là pour casser la croûte; malgré nos mises en gardes face à l'aspect rebutant des lieux . A peine sommes-nous installés que le chauffeur se transforme  en cuistot : en dix coups de hachoir il a réduit deux poulets en miettes et le voilà qui brasse cela avec des légumes et des pâtes de riz dans de l'eau chaude . Puis sa femme et sa fille se mettent à servir des saladiers de cette soupe à ceux qui ont commandé  des noodles et des bols de riz frit au poulet pour les autres . Même Sun fait le difficile en allant faire ébouillanter sa  salade en cuisine,  apparemment  après avoir fait une mauvaise rencontre en manipulant le plat de verdure posé devant lui . Nous nous en sortons malgré tout avec 70 000 kips  , soit 8 dollars boissons comprises pour 2 personnes .

















            Dès que nous reprenons la route vers 13h30 nous empruntons le fond d'une vallée dominée par une chaîne de montagne de chaque côté , couverte de forêt tropicale . Cette vallée doit être fertile apparemment à en juger par les nombreuses cultures que nous pouvons voir : des rizières , des champs de maïs et  même du coton car nous en voyons sécher au soleil un peu partout devant les maisons sur pilotis .Nous arrêtons dans le village de Ban Yor, de l'ethnie Taï Lu, où les maisons en bois sur pilotis sont magnifiques avec leurs murs en tressage de lames de bambou . A coté, on voit  souvent une petite construction similaire , dont les pilotis sont posés sur des pierres plates pour éviter aux petits rongeurs de monter manger les sac de riz  entreposés dans le grenier . Au passage on regarde de vieilles villageoises plumer des poulets à la main pendant qu'une autre grille des grains de riz dans une poêle sur la braise  un peu au dessus. Certains autochtones fabriquent des poteries utilitaires .Partout on voit des clayettes en lames de bambou couvertes de coton sécher au soleil . Nous  nous arrêtons un peu plus loin ,au bord d'un champs, pour voir les   trois stades de maturation du coton : la fleur jaune claire , le bourgeon vert et  le tampon blanc du fruit mur . Malgré tout c'est le riz qui prédomine partout, même si l'on voit quelques cultures de légumes , notamment  des champs de haricots et des cornichons .

          Vers 17h00 nous prenons possession de nos chambres à l'hôtel Nam kat Yorla Pa et nous nous dépêchons d'essayer la jolie piscine à débordement installée derrière la réception . Dommage qu'un tel établissement , doté d"un manager d'une suffisance qui n'a d'égale que son incompétence , ne soit pas capable de fournir une wifi correcte dans les chambres !






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