CINQUANTIEME JOUR : LE 28 NOVEMBRE 2019





        Cinquantième jour déjà , c'est incroyable à quelle vitesse se passe notre périple ! Aujourd'hui nous quittons les belles montagnes du Haut Tonkin , leur calme et leur fraicheur pour redescendre sur Hanoï et retrouver son tumulte , son bruit et sa chaleur . En effet , demain , nous devons prendre l'avion pour Rangon , la capitale de Mayamar , l'ex Birmanie, que avons l'intention de visiter en une vingtaine de jours . C'est avec une certaine nostalgie que nous laissons derrière nous les ethnies des Hmongs Noirs , des Dzaos Rouges, des Khaos Sapèques et des Lus avec leurs beaux villages ,leurs maisons en planches  aux toits de palmes de lataniers , leurs tissages et leurs broderies aux couleurs éclatantes . Ce matin Tchin-tchin a encore prévu une dernière balade à pieds dans les villages qui nous permettra de faire définitivement nos adieux à la région du Vietnam qui a su le plus garder son authenticité et que  pour cette raison nous plaçons à la première place après d'Halong . Pas étonnant que les colons français aient craqué pour cette oasis de fraicheur , eux qui devaient être accablés par la chaleur humide du delta du Fleuve Rouge .
















            Comme prévu avec Tchin-tchin , nous  nous retrouvons vers 8h30 dans le hall  pour charger les valises au plus vite car l'un des chauffeurs a réussi à franchir  discrètement la barrière des travaux . C'est une chance car je nous voyais mal remonter l'interminable pente que nous avions descendue à l'arrivée , il y a deux jours ! Après avoir grimper la côte en empruntant les petites rues commerçantes , nous atteignons le carrefour principal  où nous attendons les 4x4 qui doivent nous prendre au vol, tant la circulation est déjà infernale . Tchin-tchin nous explique que le grand hotel Sun Plaza  Station en face n'est pas un vestige de l'époque coloniale comme je le croyais ,mais une vulgaire copie dont le propriétaire n'est autre que Mr Sun ,le beaux fils de l'actuel Premier Ministre . Ce bâtiment sert aussi de gare pour le train à crémaillère qui mène jusqu'au pied d'un téléphérique : celui ci dessert le temple bouddhiste construit en haut de la montagne , juste en face de notre hôtel : c'est la petite lumière qui est restée allumée toute la nuit sur la crête . En sortant de Sapa par l'Est , nous profitons d'une zone de travaux, une de plus , pour nous ménager un petit arrêt photos . Notre belvédère improvisé domine la vallée de la petite rivière Muong Hoa , affluent du Fleuve Rouge,dont le confluent se situe à l'entrée de l'autoroute d'Hanoï . Tchin-tchin profite d'un second arrêt photo pour nous expliquer l'origine du  nom Sapa : "sa" veut dire  trois et "pa" planche car là-haut sur le mont Si Pan il y a trois rochers plats comme des planches posées les unes à côté des autres . Dès le début du XX ème siècle les Français marquèrent le sommet du Si Pan , le point culminant du Vietnam , d'une pyramide en métal .Au cours d'un troisième arrêt photos nous voyons un superbe escalier de rizières en terrasse totalement inondées où paissent des buffles .Tchin-tchin nous explique que les paysans ne repiquent le riz qu'au mois de mai car ici à 1500 mètres d'altitude il fait trop froid avant . C'est en été , un peu avant la moisson que les paysages sont les plus jolis , les terrasses offrant un magnifique dégradé de vert , les plus foncées en haut ,les plus claires en bas,  tirant sur le jaune carrément.Sur toute la descente de la vallée les travaux ont transformé la route en véritable piste boueuse à souhait , complétement défoncée , creusée d'énormes ornières où plongent nos 4x4 pour mieux rebondir de l'autre coté . C'est sportif  et il y a même des passages à gué  par endroit . Nous avons eu beaucoup de chance avec le soleil en début de matinée , ce qui nous a permis de profiter pleinement des magnifiques panoramas qu'offre la route car maintenant nous sommes dans le brouillard . Notre nous enfonçons alors vers le fond de la vallée  , parmi d'innombrables poinsétias qui forment de véritables haies vertes et rouges de part et d'autre de la chaussée . Parvenus en bas, Tchin-tchin nous montre un des trois barrages existant sur la Muong Hoa  dont la construction a été retardé par un tremblement de terre il y a peu de temps . Beaucoup de maisons  construites en dur ont été lézardées dans la bataille



        Dès que nous attaquons la remontée , nous essuyons des pentes à 17% , tant le coteau est escarpé . Ce n'est pas le moment de faire caler le moteur  . Le talus est si raide qu'un peu plus haut , la moitié gauche de la chaussée est partie dans le ravin . Tchin-tchin nous explique que la construction de ces barrages se solde à chaque fois par des expropriations ,du moins pour les  terrains d'en bas , les plus fertiles . Les paysans sont souvent très mal indemnisés par le  gouvernement  , tout ça pour fournir de l'électricité dont ils ne profitent pas puisqu'elle est distribuée en ville .Une fois arrivés à mi pente, nous arrêtons dans le petit village de Than Phu  ,de l'ethnie Tay, à ne pas confondre avec les Thai .Devant la plupart des maisons il y a des copeaux de manioc, ressemblant à de petits vers blancs, qui sèchent au soleil . A la quincaillerie du village, nous  voyons la petite machine qui sert à fabriquer les vermisseaux : elle est bricolée artisanalement avec quatre bouts de fer blanc soudés , qui ressemble à nos râpes à carottes .Tchin-tchin se fait escorter par un responsable du village , ce  qui nous permet de pénétrer un peu partout comme par exemple d'aller voir une distillerie d'alcool de riz ,tenue par une femme : nous goûtons l'alcool encore chaud ,tout juste sorti de l'alambique, bidouillé avec de vieilles marmites et de tuyaux en bambou , le tout sur des braises. Il se révèle aussi mauvais que lorsque nous l'avions goûter au début de notre périple .La taulière nous montre également les deux grands récipients où le jus de riz fermente . Plus loin nous voyons un papy de 76 ans entrain de fabriquer une nasse en écorce de bambou tressée .Avec sa barbiche style Oncle Ho , ses quatre quenottes restantes et ses lunettes de soudeur , il est photogénique je trouve . Tchin-tchin nous explique que ces villageois ne connaissent pas précisément leur date de naissance, parce qu'elles ne sont pas enregistrées quelque part, mais par contre on peut être sur de l'année car pour eux c'est capital de savoir s'ils sont de l'année du chien , ou du rat, pour connaitre leur avenir astrologique .De même ici au Vietnam , on a un an dès la naissance parce que l'on inclus les 9 mois de grossesse .  En ballochant dans les rues, je vois un homme jeune porter un bébé dans le dos, enroulé dans un bout de tissus comme font les femmes . Il parait que dans cette ethnie c'est le régime matriarcal qui prévaut . Parvenus au milieu du village nous avons le privilège d'assister à une cérémonie chamanique . Un villageois a demandé l'intervention de deux chamans car il a 49 ans , très mauvais nombre car égal à 7 fois 7 chez les Tay , pour la  femme c'est 53 . En offrande il donne deux poulets et un petit cochon , des bouteilles de Coca Cola , de Fanta et deux bouteilles d'alcool de riz . Les chamans , à genoux par terre marmonnent des prières en faisant brûler de l'encens . Puis ils se mettent à faire des figures au sol à l'aide de morceaux de papier faits avec de la paille de riz .Entre les deux chamans on a construit  une représentation du palais des" Esprits de la Montagne" en fines lamelles de bambou décorée de plumeaux  de joncs aux angles . Le principal intéressé assiste à la cérémonie en compagnie de ses copains , qui boivent du thé sous l'auvent de la maison . Il parait qu'une telle cérémonie coûte chère à celui qui la demande . Les offrandes sont ensuite cuites et mangées en commun avec toute l'assistance . Comme nous voyons que nous commençons à déranger , nous nous retirons discrètement .En continuant notre petit tour nous voyons une villageoise plonger une épuisette dans l'aquarium en béton installé devant chez elle pour en sortir une grosse carpe ,qu'elle assomme aussitôt d'un coup de hachoir sur la tête .







            Comme de grosses pluies ont partiellement endommagées le chemin que nous devions prendre à pieds le long de la rivière , le responsable du village nous conseille de reprendre les 4x4 pour faire les cinq bornes qui nous séparent d'un village de l'ethnie Xa Pho ,  une des cinq d'origine tibétaine au même titre que les Sila que nous avions vu sur les Hauts Plateaux . Cette communauté est l'une des plus petites au Vietnam avec 5000  personnes . A l'origine les Xa Pho étaient les esclaves des Tays . Leurs habitations sont faites en bambous tressés sur pilotis avec le bétail à l'abri en dessous . Mais de plus en plus le rez de chaussée est muré et aménagé en pièce à vivre , l'étage étant réservé aux chambres . L'habitat , comme chez les Hmong est dispersé dans la nature , parmi les bananiers et les gros bouquets de bambous . Ici aussi les femmes font de la broderies ; on voit notamment une grand mère, équipée de lunettes, initier sa petite fille à manier l'aiguille à coudre . En remontant les rues du village nous croisons de jeunes enfants sortant de l'école qui nous parait bien grande pour un petit village . Sur le fronton de celle-ci nous pouvons voir le poster sur lequel l'Oncle Ho offre un foulard rouge à une écolière . C'est ici que le parti communiste embrigade les enfants pour en faire les fameuses " Brigades Rouges "! Ce village est très pauvre car il est le plus éloigné de Sapa , pratiquement à quarante kilomètres .




            Nous reprenons maintenant les voitures pour revenir en parti sur nos pas et gagner l'entrée de l'autoroute . Un peu avant nous  nous arrêtons dans une taule assez sordide pour casser la croûte et aussi pour prendre livraison du couteau offert à Gérard . Pour finir nous avons la surprise de voir  que nos chères épouses nous en ont commandé un également en cachette . On nous sert du poisson , du poulet aux champignons et à l'ananas , du liseron , une fricassée de cerf et bien sur du riz . Pas facile de manger une darne de carpe pleine d'arêtes , dans un bol  et avec des baguettes de surcroît ! En plus comme j'ai eu l'honneur et l'avantage de traverser la cuisine pour aller aux toilettes avant le repas , c'est dur d'avoir de l'appétit dans de telles conditions ! Nous nous en tirons avec 200 000 euros pour deux , bières comprises , mais ça ne vaut même pas ça ! Et aussitôt nous reprenons l'autoroute pour ne pas arriver trop tard sur Hanoî d'autant que nous devons repasser par l'atelier de la laque avant d'aller à l'hôtel .






            Pour finir nous atteignons les premiers faubourgs de la capitale du nord vers 17h30 .Avec l'obscurité qui tombe déjà , il faut se contenter de quelques clichés des buildings déjà transformés en véritable sapin de Noël tant ils sont illuminés . Nous traversons le Fleuve Rouge sur un long pont suspendu  qui longe le Pont Paul Doumer ,mais au delà nous n'avons plus aucun souvenir , sauf de la circulation infernale . A un moment nous nous retrouvons face à une trentaine de scooters et il faut le sang froid de notre jeune chauffeur pour affronter cette meute humaine et parvenir à se faufiler le long du trottoir . Après une bonne demi heure  de remontée d'avenue dans une cohue infernale ,nous arrivons au magasin de laque qui est resté spécialement ouvert pour nous ,suite au coup de fil de Tchin-tchin . Après avoir acheté un panneau décoratif , nous repartons dans la mêlée pour atteindre notre hôtel May de Ville , une bonne demi heure plus tard . Après avoir fait nos adieux au chauffeur , c'est le moment de quitter Tchin-tchin et ce n'est pas facile  depuis prés d'un mois que nous bourlinguons ensemble toute la journée. C'est dur de quitter quelqu'un qui a su nous faire partager l'amour de son pays avec tant de convictions . Nous avons apprécier le guide , capable de répondre à toutes nos questions mais aussi  et surtout l'homme qui s'est livré tout doucement  au fil des jours à travers  ses connaissances . En tout cas un très grand merci pour tout ce que tu as fait pour nous pendant ce périple d'un mois à travers ce très beau pays qu'est le Vietnam .Merci Tchin-tchin !




            Une fois installés , nous allons terminer les bouteilles d'apéro commencées hier , chez Gérard . Puis  nous  cherchons une petite taule pour essayer de casser la croûte correctement . Pour finir nous trouvons notre bonheur au dessus d'un garage à scooters , trois rues plus loin . Des nems et surtout des French Fries , enfin de la vraie cuisine, comestible pour un Européen , et surtout pas de l'eau chaude avec quatre morceaux de je ne sais quoi qui flottent dedans ! Le panard !







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