QUARANTE SIXIEME JOUR : LE 24 NOVEMBRE 2019



       Ca y est aujourd'hui nous quittons définitivement le Laos pour retrouver le Vietnam et en visiter la région située au nord de Hanoï en compagnie de Tchin-tchin , notre guide préféré avec Ka . L'heure est donc au bilan concernant ce petit pays d'à peine six millions d'habitants , mal servi par la nature puisque dépourvu de débouché à la mer et de matières premières . Un pays très montagneux , au réseau routier en retard d'une guerre , qui n'a comme atout que le Mékong en guise de moyen de déplacement . Un peuple accueillant , profondément gentil mais inculte , avec une grosse proportion d'analphabètes . Des autochtones indolents , voir fainéants , dépourvus de sens pratique , n'ayant aucune notion de distance ni de temps , même chez les guides . Des rêveurs ayant des prédispositions pour la méditation bouddhiste !! Avec quasiment zéro industrie , c'est un pays purement agricole avec de toutes petites exploitations familiales dépourvues de matériel ; ici tout ce fait à la main . La religion bouddhiste , un frein énorme au développement , maintient la population dans l'obscurantisme : elle   est à la fois envahissante , abrutissante , dotée d'un clergé profiteur ,qui vit  au crochet d'une population déjà très pauvre, sans aucune honte . Un pays envahi en sous main  par ses voisins vietnamiens, chinois et thaïlandais qui financent les écoles , les routes et le peu d'industries existantes . Pour moi le Laos est un pays très très pauvre qui aura bien du mal à se sortir du bourbier dans lequel il est enfoncé jusqu'au cou !! Les quinze jours passés au Laos  nous ont permis de rencontrer aussi un certain nombre d’ethnies telles que les Hmong , les Taï Dam , les Aka , les Khamus , les Taï Lue et bien sur les Lao de la plaine comme Sun qui représentent seulement 40% de la population totale .Par contre c'est certainement le pays le plus authentique  que nous ayons visité en Indochine .



            Comme convenu la veille avec Sun , nous  parvenons à quitter l'hôtel vers 8h00 . Dès la sortie du parc de celui-ci  , nous arrêtons dans un village Khamu pour prendre  en photo leurs jolies maisons construites en bambous sur pilotis ,couvertes  de superbes toits de chaume .Avec les rizières en terrasse , l'ensemble a un sacré charme : c'est ici que logent une partie du  personnel du parc qui avaient organisé une petite fête hier soir avec des danses à laquelle nous n'avons malheureusement pas pu assister . Ce matin nous devons continuer à monter vers le nord en direction du poste frontière de Pang Hok . Sun nous explique que comme nous sommes dimanche nous risquons d'être obligé de payer un bakchich aux douaniers pour les dédommager du désagrément de travailler le week end !! Nous commençons par prendre la route d'Oudomxay parmi de blondes rizières à l'état de chaume qui cascadent depuis le milieu des montagnes voisines couvertes de forêts tropicales ,domaines des bananiers sauvages , des bambous , des hévéas et des fougères géantes .Non seulement il fait assez frais ce matin mais en plus il y a une brouillasse ambiante qui reste accrochée aux sommets des montagnes pendant tout le début de matinée .





         Dès la sortie d'Oudomxay nous suivons le fond d'une étroite vallée très fertile où nous traversons un chapelet de villages .Ici aussi le camaïeu de jaune des rizières déjà moissonnées alterne avec des cultures maraichères variées ; des haricots verts géants pouvant atteindre 30 cm de long , des salades en tous genres , des tomates , des patates douces  et des herbes aromatiques pour la soupe de pâtes . Nous arrêtons chez les Thaï Lue pour aller visiter le temple Vat Pra Chau Sing Khan : nous y voyons de jeunes bonzes manier la pelle et la brouette pour restaurer le temple datant de 1351 après JC doté d'un banian , l'arbre sacré de Bouddha du même age .Sun profite de notre passage pour faire un voeu mais il refuse catégoriquement de me confier de quoi il s'agit malgré mes questions pressantes . Je suis surpris par le fait qu'une fidèle caresse le centre du gong après l'avoir frappé à trois reprises pour accompagner son voeu , comme si elle voulait soulager le rond de métal après l'avoir frappé. La statue principale , un bouddha en bronze du XIV ème siècle venue en radeau sur le Mékong depuis Ventiane aurait été perdu au fond du fleuve, suite au naufrage de celui-ci  . Retrouvée quelques années plus tard , on aurait demandé à la statue de choisir entre un retour vers la capitale ou bien venir ici à Vat Pra Chau Khan et celle-ci aurait choisi la pagode où elle est exposée derrière l'autel principal actuellement .





            Nous reprenons ensuite la voiture pour aller jusqu'à la sortie du village voir la rivière Nam Phak qui a la particularité d'être chaude et salée : à son approche on voit effectivement des croûtes blanches couvrir les rochers et les cailloux qui encombrent son lit .Nous arrêtons un peu plus loin, pour aller voir une source d'eau chaude ,se jetant dans la Nam Phak : en tâtant avec la main , on peut estimer la température de l'eau à 40 degrés environ .De petits nuages de vapeur s'élèvent au dessus de la nappe d'eau chaude .Une fois que nous avons récupéré les 4x4 , nous nous mettons à suivre les nombreux méandres de la Nam Phak . Pas drôle de taper sur l'ordi ce matin entre les nombreux virages et les innombrables chaos de la route . Heureusement que sur notre droite les points de vue sur la belle rivière Phak se succèdent , cela compense un peu l'inconfort qui règne à bord . Après avoir franchi un grand pont , la route se partage en deux : à gauche on peut rejoindre la Chine distante de seulement deux heures de piste , à gauche c'est la direction du Vietnam  ,distant de 70 km .Nous nous  arrêtons dans le village pour pouvoir admirer le costume des femmes Aka , venues de Chine au VI ème siècle .Elles portent une coiffe sous forme de foulard brodé qui est enroulé autour de leur chignon . Elles ont les dents noircies à la laque et aussi à force de chiquer du bétel .Elles portent une jupe étroite brodée de couleurs vives au dessus d'un pantalon pour se protéger de l'agression des insectes et des branches dans la forêt .Elles sont descendues de leur village perdu dans la forêt pour vendre leurs tissages et quelques fruits et légumes . Elles sont de croyances animistes et non bouddhistes , c'est à dire qu'elles vénèrent des divinité telles que la pluie , le vent , le soleil , la lune et le tonnerre .





            Nous continuons à suivre la Nam Phak jusqu'à la ville de Moung Khau où elle se jette dans la Nam Pu  ; nous l'avions déjà vu au niveau de son confluent avec le Mékong prés des grottes de Pak Pu lors de notre croisière d'une journée  sur le grand fleuve . Après avoir traversé la Nam Pu en  empruntant le grand pont au centre ville , nous nous mettons à suivre son lit . Actuellement le gouvernement laossien a donné son accord aux Chinois pour construire un barrage hydro-électrique ,afin d'alimenter tous les villages du secteur, encore dépourvus d'électricité . Pour le moment les Chinois commencent par reloger les autochtones expropriés à cause de la future retenue d'eau .Après une bonne quinzaine de kilomètres , nous quittons le fond de la vallée pour grimper dans la montagne , nous offrant par la même occasion , de jolis panoramas sur les vallées voisines et sur les flancs de montagne couverts de tâches aux formes géométriques du aux cultures sur brûlis . De vrais arlequins rapiécés avec morceaux multicolores . Nous  devons commencer à être sérieusement en altitude à en juger par la taille des stères de bois devant les maisons . Nous arrêtons dans un  village pour acheter quelques bananes , car les restaurants locaux n'acceptent que les kips dont nous nous sommes débarrassés ce matin à l'hôtel lors de la check-out .




            A 13h30 nous atteignons le poste frontière laossien où il faut remplir une fiche de sortie de territoire et payer 10 000 kips de bakchich . Comme les douaniers n'acceptent pas les dollars, Christian qui a encore un   billet de 100 000 kips, paie pour tout le monde .Résultat , nous obtenons notre nouveau tampon sur le passeport dans la foulée . Nous reprenons  ensuite les 4x4 pour faire les cinq bornes  nous séparant de la douane vietnamienne . Après l'inévitable photo de groupe avec nos chauffeurs,  tirée par Sun , c'est le moment des adieux .Pour les formalités vietnamiennes proprement dites , on s'en tire avec un coup d'oeil sur notre visa et un coup de tampon sur le passeport . Il faut également passer les valises aux rayons X avant d'être accueilli par Tchin-tchin  et nos nouveaux chauffeurs. Sans plus attendre, nous commençons une interminable descente parmi des chantiers particulièrement poussiéreux et surtout coincés entre de gros semi-remorques . Malgré tout, nous nous arrêtons à mi-pente pour tirer le portrait de quelques rizières en terrasses entrain de disparaitre définitivement sous les eaux d'un nouveau lac de barrage . Une fois parvenus en bas , nous nous retrouvons dans une large vallée où coule la Nam Rom . C'est la plaine la plus fertile du Vietnam et ça se voit au premier coup d'oeil avec ces parcelles en damier où les légumes sont alignés comme des soldats . Toutes les cultures maraichères y sont représentées , mais ce sont quand même les choux qui tiennent le haut du paniers , même si l'on voit quand même des tomates ,  des haricots verts , des concombres et autres cucurbitacées . Tchin-tchin nous montre aussi des pêchers qui ne sont cultivés que pour les fleurs que l'on cueillent pour les fêtes du Tet en février . Celles-ci ont le pouvoir de chasser les mauvaises esprits qui pourraient venir la nuit , mais pas le jour car ils craignent les rayons du soleil . C'est pour cela d'ailleurs qu'un cerisier est planté à l'entrée du paradis pour en chasser les mauvais esprits




            Nous reprenons ensuite les 4x4 pour nous arrêter juste à l'entrée de Dien Bien Phu au niveau du "pont américain" construit en 1953 . Les soldats français en fuyant Hanoï se sont installés ici car ils se croyaient à l'abri  des canons des Vietcongs dans cette plaine uniquement accessible par avion puisqu'il n'y avait pas encore de route depuis Hanoï distante de 500 km . Mais les Vietcongs ont  transporté toute leur artillerie démontée en pièces détachées à dos d'homme . La bataille de Dien Bien Phu dura 56 jours avant la capitulation des Français le 7 mai 1954 . La dernière après midi coûta 1850 vies humaines au Vietcongs pour prendre les quatre mitrailleuses qui défendaient le fameux pont . En face, sur l'autre rive, on peut voir un monument dédié au colonel  Charles Pieroth qui se suicida avec une grenade lorsqu'il comprit que la situation était irrécupérable . En revenant sur nos pas,  nous passons devant le socle encore existant d'une des quatre mitrailleuses . Nous reprenons les voitures sur quelques centaines de mètres pour aller voir le QG français occupé par le commandant Christian de Castrie . Sur les 11 000 prisonniers 8000 mourront suite aux mauvais traitements infligés par les Vietcongs  , notamment en leur faisant parcourir 450 km  à pieds nus ( ils ne devaient pas savoir lire les textes de la Convention de Genève !!) Bien que non concernés familialement parlant avec Dominique nous sommes profondément touchés par cette boucherie inutile . Un petit mot spécialement pour toi , Marco  : depuis le passage de la frontière nous pensons à tous ces paysages que ton père a certainement vu comme nous les voyons actuellement et nous ne  pouvons pas nous empêcher d'imaginer les conditions de vie épouvantables qu'il a du supporté pendant 5 ans de 1949 à 1954 . Nous l'imaginons d'autant mieux qu'hier , à notre petit niveau nous avons crapahuter , certes sans le paquetage ni l'arme des soldats ,à travers la jungle et les rizières .



            Après ces vifs moments d'émotion ; nous retrouvons le Vietnam toujours aussi agité , avec ses scooters infernaux , ces coups de klaxon , ses odeurs fortes et ses papiers gras et ses plastiques qui jonchent le sol partout où l'on va . C'est fini le calme du Laos , c'est finit les jolies maisons sur pilotis , avec leurs superbes toits de chaume ! Tchin-tchin nous montre la nouvelle mode , le casque spécial chignon que nous nous dépêchons de prendre en photo .Vers 16h30 nous prenons possession de nos chambres à l'hôtel Muong Thanh . Malheureusement la piscine , installée sur le parking  ,ne nous tente guère: nous profitons donc du temps libre  dont nous disposons avant l'apéro prévu par Tchin-tchin vers 18h30 pour nous occuper du blog et des photos .

        Comme prévu Tchin-tchin nous sert un punch à sa façon vers 18h30 dans la salle de restaurant où un groupe de vietnamiens vocifèrent déjà autour de deux grandes tables rondes . Après avoir discuté de notre périple au Laos et au Cambodge , il nous quitte pour aller manger avec les chauffeurs . De notre côté , nous préférons rester  casser la croûte sur place après cette longue journée . Comme Tchin-tchin a passé la commande pour nous avant de partir nous avons la surprise de découvrir ce que l'on nous sert : un plat de liseron ébouillanté servi avec de l'ail , du buffle en sauce , du poisson chat aux petits légumes servi avec une sauce assez relevée , une salade de choux ,une fricassée de porc et du riz gluant bien sur,  le tout pour 280 000 dongs , soit 12 dollars par couple , boissons comprises










Photo spéciale pour Mumu : je sais que tu adores ce genre de bestiaux



                                                        C'est le casque spécial chignon

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